Le Jaboty et le Fruit défendu Fables Brésiliennes

Il y avait autrefois dans la forêt un fruit que tous les animaux avaient envie de manger ; mais il leur était défendu de manger ce fruit, à moins d’en connaître, d’abord, le nom. Tout près de l’arbre, habitait une femme. Les animaux allaient chez elle, lui demandaient comment s’appelait le fruit, et revenaient au pied de l’arbre, pour en manger ; mais, quand ils y arrivaient, ils ne se souvenaient plus du nom. Cela arriva à tous les animaux : ils allaient chez la femme, revenaient, et pas moyen de se rappeler le nom du fruit.
Seul le Jaboty n’y était pas encore allé. Les autres animaux allèrent le chercher pour qu’il s’y rendît à son tour. Quelques-uns se moquaient même de lui, et lui disaient : « Si les autres ne s’en sont pas souvenus, comment sera-t-il plus fin ? » L’ami Jaboty s’en alla chez la femme, après avoirpris sa petite mandoline. En y arrivant, il demanda comment s’appelait le fruit. La bonne femme lui répondit r « Bo yoyô — boyoyô — quizama — quizu — boyoyô — ho- yoyô — quizama — ‘quizu. » Mais la femme, quand chaque animal prenait congé d’elle et se trouvait déjà un peu loin, avait l'habitude de lui crier: — « Eh l’ami ! Ce n’est pas ce nom-là ! » Et elle lui criait d’autres-noms, aussi compliqués. L’animal se troublait, confondait tous ces noms, et, quand il arrivait au pied de l’arbre, il ne pouvait jamais retrouver le véritable nom du fruit.
Il n’en fut pas de même avec l’ami Jaboty. À peine la femme lui en eut-elle dit le nom, qu’il prit sa mandoline et se mit à chanter ce nom tout le long du chemin, jus qu’au pied de l’arbre, de sorte qu’il fut plus fin que tous les autres.
Mais commère l’Once, qui l’attendait là-bas, lui dit r — « Dites donc, ami Jaboty, vous ne pouvez pas grimper là-haut ; laissez-moi monter pour cueillir les fruits ; en revanche, vous m'en donnerez quelques-uns. » Le Jaboty y consentit. L’Once remplit son sac de fruits, et se sauva sans en donner un seul au Jaboty. Celui-ci, furieux, se mil à sa poursuite.
Ils arrivèrent ainsi au bord d’une rivière profonde. Le Jaboty dit à l’Once : — « Amie Once, confiez-moi votre sac pour que je le passe de l’autre côté, car je suis meilleur nageur que vous ; vous traverserez après. » L’Once y consentit. Mais le finaud, dès qu’il eut touché terre de l’autre côté, se sauva, et l’Once resta attrapée.
L’Once, pour se venger, conçut le plan de le tuer. Il s’en douta et se cacha sous les racines d’un grand arbre, près duquel l’Once avait l’habitude d’aller se reposer. Quand l’Once y arriva, elle se mit à crier : « Ami Jaboty! Ami Jaboty ! «Le finaud lui répondait à ses côtés :
« Oï ! » L’Once regardait de droite et de gauche, sans apercevoir personne. Elle en fut effrayée, et s’imagina que c’était son derrière qui lui répondait. Elle se mit à crier de nouveau , et toujours le Jaboty répondait : « Oï ! » Et elle de dire : « Tais-toi, trou aux œufs ! »
L’ami Singe vint à passer sur ces entrefaites. L’Once lui raconta la désobéissance de son derrière, et le pria de le corriger d’importance. Le Singe s’acquitta de sa mission si bien eL frappa l’Once avec tant de conscience qu'elle en mourut.
Alors, le Jaboty se déclara satisfait.

Folkore brésilien





Commentaires