Qui n'a blâmé, qui ne censure encore
Le courtisan, cet être au cœur froid, oublieux,
Qui lorsque l'astre qu'il adore,
Dans sa marche a quitté les cieux,
Tourne ses regards vers l'aurore.
Est-ce que du couchant nous voyons revenir,
L'étaile qui monte et qui brille
Et qui du firmament où sa clarté scintille
Dans l'Océan va s'engloutir ?
Est-il bien un homme capable,
De saluer en face l'Orient,
Sans, effet d'une loi physique inévitable,
Tourner du même coup le dos à l'Occident ?
C'est de tout courtisan la règle invariable.
Aussi qu'avec raison on a fait son portrait,
En le stygmatisant d'un trait,
Qui marque au front même le plus habile
De son crayon indélébile.
C'est, a-t-on dit, un homme qu'on peut voir
De la faveur assiéger le boudoir,
Sollicitant à sa toilette,
Sans en paraître humilié,
L'honneur de tenir, la cuvette
Où son front est purifié ;
Mais qui, lorsqu'à la fin la fortune se lasse,
Croyant bien laver son affront,
De sa main.insolente et basse
La brise sur ce même front.
Voilà le courtisan, le rongeur parasite
Qui pour se faire place écarte le mérite,
Et dont le méprisable état
Est d'être lâche ou d'être ingrat.
Faut-il donc l'imiter, et que peut l'homme honnête ?
Avec mépris il détourne la tête.