Le Miroir et le Portrait François-Benoît Hoffman (1760 - 1828)

Au temps jadis une femelle
Sans agréments, sans esprit, sans beauté,
Et pourtant pas sans vanité,
Désira son portrait. Vint un enfant d'Apelle
Qui lorgna, dessina, mais surtout qui vanta
Toutes les grâces du modèle.
Vous êtes charmant, lui dit-elle ;
Mais ne me flattez point. Le peintre la flatta.
Le portrait fait, il l'apporta.
Dieux ! quel plaisir ! O surprise charmante !
Mais c'est bien moi ! mais, mais j'y suis parlante !
Parents, voisins sont accourus,
Qui répétèrent en chorus :
Il est parlant ! mais c'est à s'y méprendre !
Si ce n'est que madame a l'air encor plus tendre,
Le coloris plus frais, plus de feu dans les yeux ;
A cela près le portrait est au mieux.
Ainsi, dans l'art croyant voir la nature,
L'original admirait la peinture
Sans se lasser de la revoir ;
Quand par malheur la folle aperçut un miroir.
Ciel, quelle horreur ! dieux, quelle glace impure !
Que ce verre est mauvais ! que ce miroir est faux !
Il m'a renversé la figure.
Vite, au miroir elle tourna le dos,
Et caressa la miniature.

On chérit le flatteur qui cache nos défauts,
On fuit l'ami qui les censure.

« Le Miroir et le Portrait »

On chérit le flatteur qui cache nos défauts,
On fuit l'ami qui les censure.





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