L'Enfant et la Branche Frédéric Rouveroy (1771 - 1850)

Un enfant faisait le mutin
Et refusait d'obéir à son père,
Qui, loin de déployer un ton brusque et sévère,
Lui dit Allons, mon fils, faire un tour au jardin.
Tiens, regarde c'est bien dommage
Que cette branche d'espalier
Ne soit pas liée au treillage !
L'arbre en est déparé : Mon fils prends cet osier,
Palisse-la toi-même, étends bien son feuillage ;
Je me souviens, moi, qu'à ton âge
J'étais un petit jardinier.
Cette fois le marmot fut sage,
Il obéit en docile écolier.
La branche résistait, il force davantage,
Elle se rompt. - Eh ! que fais-tu donc là !
- Papa, je n'en puis rien ; la branche est peu flexible ;
Je crois qu'il était impossible
De la courber comme cela,
Sans la voir éclater. Je n'osais vous le dire,
Mais je m'en doutais bien. - Pourquoi ?
- Serait-ce à moi de vous instruire ?
Papa, vous le savez et beaucoup mieux que moi.
- Et toi, tu ne le sais, je gage ?
Oh ! que si ! - Parle donc. On pouvait sans effort
Plus jeune la courber, l'attacher au treillage ;
Le jardinier sans doute eut tort
De la laisser ainsi. -Tu te juges toi- même
Mon fils, il faut en convenir.
Oui, cette branche était l'emblème
Que ma bonté voulait t'offrir.
Tu méritais un châtiment sévère ;
J'ai voulu t'en convaincre au lieu de te punir ;
Va donc, une autre fois sache mieux obéir.
Confus, humilié, l'enfant quitte són père,
Sans murmurer se rend à son devoir ;
Et par sa conduite il fit voir
Qu'il faut près d'un élève agir avec prudence,
En captivant son cœur, soumettre sa raison,
Et que la sage expérience
Est, en tout temps, la première leçon.

Livre I, fable 7




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