Salut, bosquets chéris ! salut, douce retraite,
«Où je vis ignoré du monde et le fuyant !
< < « Salut, ô nuit mystérieuse,
« Qui répands à l'entour la paix et la fraîcheur,
« Par ton ombre silencieuse
« Qui viens protéger mon bonheur !
« Salut, ô notre mère, ô féconde nature !
«Ici je puis en liberté
« Goûter de tes bienfaits l'influence si pure,
«Et dans mes chants sans art célébrer ta beauté. »
C'est ainsi qu'au sein d'un bocage
Un gentil rossignol caché dans le feuillage,
S'élevant par degrés en son chant gracieux,
Aux heures de la nuit gazouillait tout joyeux.
Voilà que tout à coup dans son modeste empire
Un autre son vient retentir encor.
Le son argentin d'une lyre
Se marie à son chant, l'accompagne en accord.
Le rossignol s'étonne et s'épouvante :
« Je suis trahi, dit-il, je m'enfuis et me tais. >>>
Hôte aimable de ces bosquets,
Ne crains rien, dit alors une voix bienveillante ;
Je cherche, comme toi, le silence et la paix.
Au culte d'Apollon j'ai consacré ma vie ;
A ses mystères saints, seul, je me préparais ;
Ta voix s'est fait entendre, et mon âme ravie
Près de toi s'est sentie attirée en ces lieux.
Prends-moi pour ton disciple, oiseau mélodieux ;
Permets qu'à tes accents ma lyre soit unie !
M'instruisant près de toi, je servirai bien mieux
L'auguste dieu de l'harmonie. »

La vertu cherche à se voiler
A l'ombre de la modestie,
Mais sa céleste mélodie
Vient aux cœurs purs bientôt la révéler.
Plus elle veut demeurer ignorée,
Se dérober à tout regard,
Plus sa beauté fidèle, ingénue et sans art,
Par les âmes d'élite est toujours admirée.

Livre II, Fable 4




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