Un Pélican vivait rêveur et solitaire
Au bord d’un limpide ruisseau.
Il avait peu d’amis, quoique sa vie entière
Eût été le feu le plus beau.
Par-ci par-là pourtant, on voyait quelque oiseau
Qu’attirait la source légère
Dissiper, en passant, sa langueur ordinaire.
— Pourquoi, lui demandait un jour
Une jeune Colombe, au sein de la prairie,
N’allez-vous pas goûter l’amour ?
La société seule enchante notre vie.
Vous pourriez trouver dans nos champs
Mille oiseaux qui seraient comme votre famille. —
Il répondit : — Les Pélicans
Aiment de trop d’amour, pour être heureux, ma fille,
Sans de véritables enfants.
Combien d’oiseaux m’ont dit : « Je vous aime, bon père. »
Et puis ont contristé mon cœur ?
Ah ! laissons voltiger les oisillons, ma chère,
Fidélité seule est bonheur.
J’aime mieux méditer sur ce bord solitaire
Où je ne connais point d’ingrats,
Que d’aller dans le monde en faire à chaque pas ! —

Livre I, fable 4




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