Enfant que j'aime d'amour tendre,
Tu veux, ma fille, a ton propos,
Contre La Fontaine en champ clos
Me faire de nouveau descendre;
Tu veux une fable pour toi.
Payé d'un baiser, ton vieux père
S’aventure pour te complaire
A tenter ce nouveau tournoi.
Au sein dune fraiche vallée
D'ombre et de jour entremêlée
Une source, aux ondes d'azur,
Sur la mousse et la molle arène
Sans bruit avec lenteur promène
De ses eaux le cristal plus pur.
Entre les fleurs que sa main sème
Du ruisseau Dieu s'est plu lui-même
A tracer les mille contours ;
Les cieux dans leur beauté suprême
Se réfléchissent en son cours
Et quiconque en foule la rive
Des élus, dans sa foi plus vive,
Rêve les suaves amours.
infant que j'aime tant, doux ange
Que Dieu dune sainte phalange
A détaché pour mon bonheur,
Ce ruissel, à l'eau transparente 5
Suivant si doucement la pente
Que lui fit la main du seigneur,
Est ton âme pure et candide
Qui suit la voie où Dieu la guide
A travers le vallon des jours ;
Soumise à la volonté sainte,
Elle suit la divine empreinte,
Quelques en soient les détours.
Par l'éclat de ses folles joies
De l'attirer dans d'autres voies
Le monde essaiera bien souvent .
Mais, aveugle à ce faux mirage,
Jusqu’au bout du pèlerinage
Dun pas ferme toujours marchant,
Doux ange, enfant que j'aime tant,
Tu garderas pour ton symbole
Le ruisseau de ma parabole.

Livre II, fable 8


Alger, 22 Aout 1853.

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