Un éléphant, des plus tiers, des plus beaux,
Observateur et grand naturaliste,
Voyageant par monts et par vaux,
Suivait la nature à la piste.
Il rencontre un tout petit chien,
Qui regarde, s'arrête à sa vue, et s'effraie ;
Puis, dans son trouble extrême, essoufflé, court, va, vient,
Et se cache sous une haie.
L'observateur, saisi d'étonnement,
Du petit chien tremblant s'approche,
L'examine soigneusement,
De sa trompe l'accroche,
Et, l'enlevant, plein d'admiration,
Tout haut se livre à sa réflexion :
« Entre nous deux, Ciel ! quelle différence !
Quelle vigueur en moi, quelle faiblesse en lui !
Pourquoi Dieu, dans sa prévoyance,
Fait-il un être si petit,
Si faible et sans nulle défense,
Quand il a pu créer un éléphant !
A peine suffit-il de mes dents meurtrières
Pour repousser lions, et tigres et panthères.
Quoi ! tu n'es pas. mon cher, mangé presqu'en naissant ?
— Admire, ami, la Providence,
Elle a placé ma force en ma prudence ! »