Un âne, un jour, trouva par terre
Une flûte : aussitôt l'animal curieux
De tous côtés la retourne et la flaire.
En la flairant, il souffle : un ut mélodieux
Sortit de l'instrument sonore.
« Que les envieux, les méchants,
S'écria le baudet, viennent redire encore
Que les ânes sont lourds, stupides, ignorants. »
« Orgueilleuse et vile pécore !
Interrompit un vieux renard,
Ne fais pas sottement honneur à ton génie
D'un son produit par le simple hasard. »
Mes chers frères en poésie,
N'avons-nous donc jamais partagé la folie
De l'orgueilleux Aliboron ?
Et quand par le hasard notre muse inspirée
D'un vers heureux est parfois accouchée,
Ne nous sommes-nous pas proclamés sans façon
Les enfants chéris d'Apollon ?