Une fauvette, sur son nid,
Chantait le bonheur d'être mère,
Quand, soudain, son œil s'assombrit :
Elle voyait une vipère
Se faufiler sous son buisson.
Aussitôt finit sa chanson.
Frémissante d'horreur, notre brave fauvette
Se présente au combat, sonnant de la trompette.
« O mères, criait-elle, accourez ! accourez !
Ou mes pauvres petits vont être dévorés. »
La vipère étonnée, en sifflant, se redresse.
« Tu ne peux m'échapper, dit-elle, ton adresse,
Ta fureur et tes cris ne sauraient prolonger
Une lutte inégale, et pour moi sans danger ;
Retire-toi d'ici ; je te laisse la vie ;
Je veux sur tes petits contenter mon envie.
—• Et moi, dit l'oisillon, je vais tuer les tiens.
Je les ai vus là-bas, hier soir, je m'en souviens. »
Elle part à ces mots, poussant un cri de joie...
La vipère aussitôt abandonne sa proie.
Un chétif ennemi la frappe de terreur ;
Se voyant menacée, à son tour elle a peur...
Elle rampe, bondit, tremblant pour sa nichée,
A l'ombre des roseaux, sous la mousse cachée.
Et la fauvette va rejoindre ses petits :
Ils sont là, dans leur nid, l'un sur l'autre blottis ;
Je vous laisse à penser ses soupirs et ses larmes.
0 mères, vous avez de terribles alarmes !
Mais pour vous la fortune a de charmants retours.
Qu'il est doux de revoir tous ces petits amours
Reposer confiants sous l'aile maternelle,
A peine réchappés d'une mort si cruelle !
Contre l'iniquité, c'est ainsi que l'on voit,
Avec l'aide du Ciel, triompher le bon droit.